De nombreux Français expatriés conservent des biens immobiliers en France et perçoivent des revenus locatifs générés par ces propriétés. Cette situation patrimoniale soulève immédiatement des questions fiscales spécifiques : comment sont imposés ces revenus ? Quelles obligations déclaratives doivent être respectées ? Existe-t-il des différences avec le régime fiscal applicable aux résidents français ? Le statut de non-résident fiscal confère-t-il des avantages ou des inconvénients particuliers ?
La fiscalité immobilière des propriétaires expatriés obéit à des règles distinctes de celles applicables aux résidents, mobilisant à la fois les dispositions du Code général des impôts relatives aux non-résidents et les conventions fiscales internationales éventuellement applicables. Comprendre ces mécanismes permet d’optimiser sa situation fiscale et de remplir correctement ses obligations déclaratives.
Les impôts locaux et l’IFI
La taxe foncière
Lorsqu’un expatrié possède des biens immobiliers en France, les impôts locaux demeurent dus selon les règles de droit commun. La taxe foncière est gérée par le service des impôts du lieu de situation du bien immobilier. Le propriétaire non-résident reste redevable de cet impôt dans les mêmes conditions qu’un résident, le lieu de résidence fiscale du propriétaire n’influençant pas cette obligation.
L’Impôt sur la Fortune Immobilière
Selon l’administration fiscale, sous réserve des conventions internationales, les non-résidents sont imposables à l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) s’ils détiennent en France un patrimoine immobilier net supérieur à 1,3 million d’euros. Ce seuil d’imposition correspond à celui applicable aux résidents fiscaux français.
Toutefois, seuls les biens immobiliers situés en France entrent dans l’assiette taxable de l’IFI pour les non-résidents, contrairement aux résidents français dont le patrimoine immobilier mondial est pris en compte. Cette territorialité de l’impôt constitue une différence fondamentale entre les deux régimes.
La distinction fondamentale : résident et non-résident fiscal
L’importance du statut fiscal
La situation et les obligations envers l’administration fiscale française dépendent fondamentalement du lieu de domiciliation fiscale. Le statut fiscal constitue le critère premier pour déterminer le régime d’imposition applicable et l’étendue des obligations déclaratives.
Une personne est considérée comme non-résidente fiscale lorsqu’elle ne remplit aucun des critères de résidence fiscale française définis à l’article 4 B du Code général des impôts (absence de foyer permanent en France, absence de séjour principal en France, absence d’activité professionnelle principale en France, et absence du centre des intérêts économiques en France) et par la convention fiscale éventuellement applicable.
Le périmètre de taxation des non-résidents
Les non-résidents fiscaux ne sont imposables en France que sur leurs revenus de source française. Cette territorialité de l’impôt signifie qu’un expatrié propriétaire d’un bien immobilier en France sera imposé sur les revenus locatifs générés par ce bien, mais échappera à l’imposition française sur ses autres revenus mondiaux, contrairement aux résidents fiscaux français soumis à une imposition mondiale.
L’imposition des revenus locatifs des non-résidents
La catégorie fiscale applicable
Les revenus tirés de biens immobiliers situés en France sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers pour la location nue, ou des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) pour la location meublée. Cette distinction fondamentale détermine les règles d’imposition applicables et les possibilités d’optimisation fiscale.
La location non meublée : revenus fonciers
Les revenus perçus de la location de biens non meublés sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers. Le propriétaire expatrié peut opter entre deux régimes fiscaux selon le montant de ses revenus locatifs.
Le régime micro-foncier s’applique automatiquement lorsque les revenus locatifs annuels n’excèdent pas 15 000 euros. Ce régime simplifié permet de bénéficier d’un abattement forfaitaire de 30% représentant les charges, l’imposition portant donc sur 70% des revenus encaissés.
Le régime réel permet de déduire l’intégralité des charges réelles supportées : intérêts d’emprunt, travaux de réparation et d’entretien, charges de copropriété, taxe foncière, primes d’assurance, frais de gestion. Ce régime s’avère généralement plus avantageux lorsque les charges réelles dépassent 30% des revenus, ou en présence d’un emprunt générant des intérêts déductibles importants.
L’avantage du taux moyen pour les non-résidents
Les propriétaires non-résidents bénéficient d’un avantage fiscal spécifique : la possibilité d’application du taux moyen lorsqu’il s’avère plus favorable que le taux marginal.
Pour bénéficier de ce mécanisme, l’expatrié doit déclarer l’ensemble de ses revenus mondiaux (français et étrangers) permettant à l’administration fiscale de calculer un taux moyen d’imposition. Ce taux moyen sera ensuite appliqué uniquement aux revenus de source française, potentiellement plus avantageux que le barème progressif standard.
Cette option peut générer des économies d’impôt substantielles, particulièrement lorsque les revenus mondiaux placent le contribuable dans une tranche marginale élevée mais que les seuls revenus français relèveraient d’une tranche inférieure.
La location meublée : BIC
La location meublée relève de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), y compris lorsqu’elle est exercée à titre occasionnel. Cette qualification fiscale ouvre l’accès à des régimes d’imposition potentiellement très avantageux.
Deux statuts principaux structurent la location meublée. Le statut de Loueur en Meublé Non Professionnel (LMNP) s’applique lorsque les recettes annuelles n’excèdent pas 23 000 euros ou ne représentent pas plus de 50% des revenus globaux du foyer fiscal. Le statut de Loueur en Meublé Professionnel (LMP) s’applique lorsque les recettes annuelles dépassent 23 000 euros et constituent plus de 50% des revenus professionnels du foyer.
Au sein de ces statuts, deux régimes d’imposition coexistent. Le régime micro-BIC (applicable sur la base de critères fondés sur le chiffre d’affaires réalisé) permet un abattement forfaitaire de 50% (ou 71% pour les meublés de tourisme classés) représentant les charges. Le régime réel permet la déduction de toutes les charges réelles et, élément crucial, l’amortissement du bien et des meubles, pouvant conduire à une imposition nulle voire à la génération de déficits reportables.
L’avantage expatrié en location meublée
Les propriétaires non-résidents pratiquant la location meublée bénéficient d’un avantage structurel important pour accéder au statut LMP. Ne disposant généralement d’aucun autre revenu professionnel en France, ils remplissent facilement la condition des 50% de revenus professionnels dès lors que leurs recettes locatives meublées dépassent 23 000 euros annuels.
Le statut LMP ouvre des avantages fiscaux significatifs : exonération potentielle de plus-values à la revente sous conditions, déduction des déficits des revenus globaux sans limitation, et transmission successorale facilitée. Attention l’application de ce régime est susceptible d’entraîner l’obligation d’une immatriculation en France et l’exigibilité de contributions sociales, il doit donc nécessairement faire l’objet d’une étude préalable spécifique.
Les prélèvements sociaux
Le principe d’application aux non-résidents
Les prélèvements sociaux (CSG, CRDS, prélèvement de solidarité) s’appliquent en principe aux revenus immobiliers de source française perçus par les personnes domiciliées hors de France. Le taux global des prélèvements sociaux s’élève actuellement à 17,2%.
Cette taxation sociale vise à contribuer au financement de la protection sociale française, même lorsque le bénéficiaire des revenus ne réside plus fiscalement en France.
L’exonération pour les affiliés à un régime européen
Les expatriés affiliés à un régime de sécurité sociale dans un pays de l’Espace Économique Européen (EEE) ou en Suisse bénéficient d’une exonération des prélèvements sociaux CSG et CRDS. Cette exonération résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne considérant que ces prélèvements constituent des cotisations sociales.
Toutefois, les revenus de ces expatriés demeurent soumis au prélèvement de solidarité au taux de 7,5%, contribution fiscale distincte des cotisations sociales proprement dites.
Pour les expatriés relevant d’un régime de sécurité sociale dans d’autres États hors EEE, les prélèvements sociaux restent dus au taux global de 17,2%, aucune exonération n’étant applicable.
Le relèvement du taux d’imposition
La législation fiscale française a procédé à un relèvement significatif du taux d’imposition des non-résidents. Historiquement fixé à 20% pour les premières tranches, ce taux a été porté à 30% à partir d’un certain seuil de revenus.
Cette évolution législative vise à limiter les écarts de traitement fiscal entre résidents et non-résidents et à accroître les recettes fiscales tirées de l’imposition des revenus de source française.
Les obligations déclaratives
Les propriétaires expatriés doivent souscrire une déclaration de revenus annuelle auprès du service des impôts des non-résidents (SIPNR) situé à Noisy-le-Grand. Cette déclaration doit mentionner l’intégralité des revenus de source française perçus durant l’année fiscale.
Les délais de déclaration et de paiement peuvent différer de ceux applicables aux résidents. Une attention particulière doit être portée au respect de ces échéances pour éviter l’application de pénalités de retard.
L’impact des conventions fiscales internationales
Les conventions fiscales bilatérales conclues entre la France et le pays de résidence de l’expatrié peuvent modifier substantiellement les règles d’imposition précédemment exposées. Ces traités prévalent sur le droit interne et peuvent prévoir des règles spécifiques de répartition du droit d’imposer, des taux réduits ou des exonérations.
Il convient impérativement de consulter la convention fiscale applicable pour déterminer avec précision le régime d’imposition effectif des revenus locatifs. Les stipulations conventionnelles varient considérablement d’un pays à l’autre, rendant impossible toute généralisation.
La fiscalité immobilière des propriétaires expatriés obéit à des règles spécifiques présentant des différences notables avec le régime applicable aux résidents fiscaux français. Si certains aspects peuvent s’avérer moins favorables (taux d’imposition relevé, prélèvements sociaux applicables dans certains cas), d’autres dimensions offrent des opportunités d’optimisation intéressantes : application du taux moyen, accès facilité au statut LMP, exonération partielle ou totale des prélèvements sociaux pour les affiliés européens.
La complexité de ces règles, leur évolution régulière et l’impact déterminant des conventions fiscales internationales justifient pleinement le recours à un accompagnement juridique et fiscal pour sécuriser sa situation, optimiser sa charge fiscale et garantir le respect intégral des obligations déclaratives.
Nos avocats en droit fiscal international se tiennent à votre disposition pour répondre à toutes vos questions et vous conseiller. Nous proposons des entretiens en présentiel ou en visioconférence. Vous pouvez prendre rendez-vous directement en ligne sur https://www.agn-avocats.fr/.
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