De nombreux couples français ou binationaux se séparent alors qu’ils résident à l’étranger, conduisant à un divorce prononcé par une juridiction étrangère. Pour que cette décision produise tous ses effets en France, notamment sur les actes d’état civil français, une procédure de reconnaissance s’avère nécessaire. Cette démarche administrative, parfois méconnue, permet d’actualiser les registres français et de garantir la validité juridique du divorce sur le territoire national.
Les modalités de reconnaissance varient selon le pays où le divorce a été prononcé et la date de la procédure. Comprendre ces règles permet d’accomplir les démarches appropriées et d’éviter les complications administratives ultérieures.
Le principe général : la vérification d’opposabilité
Qu’est-ce que la vérification d’opposabilité ?
En règle générale, un divorce prononcé par une autorité étrangère doit faire l’objet d’une vérification d’opposabilité effectuée par le Procureur de la République compétent. Cette procédure vise à s’assurer que la décision étrangère respecte les principes fondamentaux du droit français et ne comporte aucune irrégularité manifeste empêchant sa reconnaissance.
Le Procureur compétent varie selon le lieu de célébration du mariage : si le mariage a été célébré en France, c’est le Procureur de la République dont dépend l’officier d’état civil qui l’a célébré. Si le mariage a été célébré à l’étranger, la compétence appartient au Procureur de la République près le Tribunal Judiciaire de Nantes.
Avertissement important sur la transcription préalable
Si le mariage a été célébré à l’étranger à compter du 1er mars 2007, l’acte de mariage doit avoir été préalablement transcrit sur les registres de l’état civil français. Cette transcription constitue une condition préalable obligatoire à toute procédure de reconnaissance du divorce. Les couples concernés doivent donc vérifier cette transcription avant d’entamer les démarches de reconnaissance de leur divorce.
Les pays nécessitant la vérification d’opposabilité
Champ d’application
La procédure de vérification d’opposabilité s’applique obligatoirement aux divorces prononcés dans les pays situés hors de l’Union européenne, ainsi qu’au Danemark qui, bien que membre de l’UE, n’applique pas le règlement européen pertinent en matière de divorce.
Cette procédure concerne donc la majorité des pays du monde : continents américain, africain, asiatique, Océanie, ainsi que certains pays européens non membres de l’Union.
Les documents à fournir
La demande de vérification d’opposabilité adressée au Procureur de la République doit être accompagnée d’un dossier complet comprenant plusieurs justificatifs essentiels.
Une copie intégrale de la décision de divorce en original ou en copie certifiée conforme doit être fournie. Si la décision n’est pas motivée, il convient également de produire l’acte de saisine du tribunal ou tout autre document comportant l’exposé de la demande initiale.
La preuve du caractère définitif de la décision étrangère constitue un élément crucial. Cette preuve peut être apportée par différents documents : certificat de non-recours, acte d’acquiescement, certificat établi par un avocat ou toute autre autorité habilitée, ou tout acte étranger portant mention du caractère définitif.
Les pièces établies en langue étrangère doivent être accompagnées d’une traduction effectuée par un traducteur expert, éventuellement légalisée selon les exigences de l’autorité compétente.
La preuve du domicile et de la nationalité des deux parties au jour de l’introduction de l’instance devant l’autorité étrangère doit également être fournie, si ces informations ne ressortent pas directement de la lecture de la décision elle-même.
Enfin, les copies intégrales des actes d’état civil français (naissance et mariage) conservés par une autorité française doivent être produites, car c’est en marge de ces actes que sera apposée la mention du divorce après vérification favorable.
La procédure et les délais
Une fois le dossier complet transmis au Procureur de la République, celui-ci examine la décision étrangère pour vérifier sa conformité aux principes essentiels du droit français. Si la décision est jugée opposable en France, le Procureur donne instruction aux officiers d’état civil concernés d’apposer la mention de divorce en marge des actes dont ils sont détenteurs.
Les délais de traitement peuvent varier selon les parquets et la complexité du dossier, généralement de quelques semaines à plusieurs mois.
Le régime simplifié pour l’Union européenne
Le règlement européen de 2003
Le règlement n°2201/2003 du Conseil de l’Union européenne, également appelé « Bruxelles II bis » a considérablement simplifié la reconnaissance des divorces prononcés dans les États membres de l’UE. Ce texte instaure un principe de reconnaissance automatique dispensant de la procédure de vérification d’opposabilité dans de nombreux cas. Depuis le 1er août 2022, c’est le règlement UE n°2019/1111 appelé “Bruxelles II ter” qui s’applique.
Les conditions d’application
Pour bénéficier de cette dispense, plusieurs conditions doivent être réunies. D’abord, le divorce doit avoir été prononcé dans l’un des pays membres de l’Union européenne, à l’exception du Danemark qui n’applique pas ce règlement.
Ensuite, la procédure de divorce doit avoir été engagée après une date précise variant selon le pays et son adhésion à l’Union : après le 1er mars 2001 pour les pays membres originels (Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal, Suède), après le 1er mai 2004 pour les pays ayant adhéré à cette date (Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, République Tchèque, Slovaquie, Slovénie), après le 1er janvier 2007 pour la Roumanie et la Bulgarie.
Concernant le Royaume-Uni, le régime simplifié s’appliquait pour les procédures engagées entre le 1er mars 2001 et le 31 décembre 2020, date de sortie effective de l’Union européenne.
La procédure simplifiée directe
Pour les divorces bénéficiant du régime simplifié, les intéressés s’adressent directement aux officiers d’état civil détenteurs de leurs actes de naissance et de mariage pour demander l’apposition de la mention correspondante, sans passer par le Procureur de la République.
Le dossier à présenter comprend une demande écrite datée et signée précisant l’identité des deux ex-époux et les actes à mettre à jour, une copie intégrale de la décision de divorce en original ou certifiée conforme avec éventuelle traduction, et surtout un certificat spécifique établi par la juridiction ou l’autorité étrangère compétente.
Ce certificat, prévu à l’article 39 du règlement européen et conforme à l’annexe I, constitue le document central de la procédure simplifiée. Il atteste de la régularité de la décision selon les critères européens. À défaut de certificat, tout document permettant de disposer des renseignements équivalents peut être accepté.
Les copies intégrales ou extraits de tous les actes d’état civil français dont la mise à jour est sollicitée doivent également être joints. Pour les mariages célébrés à l’étranger avant le 1er mars 2007 et non conservés par une autorité française, une copie de l’acte de mariage accompagnée d’un formulaire multilingue ou d’une traduction doit être fournie.
Les conséquences de la reconnaissance
Une fois la mention de divorce apposée en marge des actes d’état civil français, le divorce étranger produit pleinement ses effets en France. Cette mention permet notamment de justifier de son statut matrimonial pour toute démarche administrative, de se remarier en France, et d’actualiser tous les documents officiels.
L’absence de reconnaissance formelle du divorce étranger peut créer des complications juridiques importantes : impossibilité de se remarier en France, difficultés pour les démarches administratives, et problèmes potentiels concernant les droits sociaux ou fiscaux.
Les implications juridiques complexes
Au-delà de la simple reconnaissance administrative, les divorces internationaux soulèvent souvent des questions juridiques complexes nécessitant une expertise spécialisée : application du droit français ou du droit étranger selon les situations, validité des clauses du jugement de divorce étranger concernant la prestation compensatoire, la pension alimentaire ou la garde des enfants, reconnaissance et exécution en France des obligations financières fixées par la décision étrangère, conséquences sur le régime matrimonial et le partage des biens, implications fiscales et sociales du changement de statut.
La reconnaissance d’un divorce prononcé à l’étranger suit des procédures différentes selon le pays d’origine de la décision. Pour les divorces hors Union européenne et au Danemark, une vérification d’opposabilité par le Procureur de la République reste nécessaire, nécessitant la constitution d’un dossier complet de justificatifs.
Pour les divorces prononcés dans les pays de l’Union européenne (hors Danemark) répondant aux conditions temporelles, une procédure simplifiée permet de s’adresser directement aux officiers d’état civil avec un certificat européen spécifique.
Dans tous les cas, l’actualisation des registres français constitue une démarche essentielle pour garantir la pleine opposabilité du divorce en France et éviter des complications ultérieures. La complexité des règles applicables et les enjeux juridiques associés justifient souvent le recours à un conseil juridique spécialisé en droit international de la famille.
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