Il y a dans les relations entre l’employeur et l’URSSAF un principe tacite, mais omniprésent : la bonne foi. La présomption de bonne foi constitue un principe général du droit civil, transposé dans de nombreux contentieux, y compris en matière sociale. Selon l’Article 2274 du Code civil, « La bonne foi est toujours présumée, et c’est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver ».
Lorsqu’une entreprise sollicite un échelonnement de sa dette sociale, elle ne présente pas seulement des chiffres et des tableaux de trésorerie : elle expose une attitude. Car au-delà du formalisme des articles du Code de la sécurité sociale, c’est bien la confiance qui gouverne la décision.
La bonne foi au cœur des décisions de l’URSSAF
L’article R243-21 du Code de la sécurité sociale confère au directeur de l’URSSAF le pouvoir d’accorder des échéanciers de paiement et des sursis à poursuites pour le règlement des cotisations et contributions sociales, des pénalités et des majorations de retard. Ce pouvoir est discrétionnaire : il s’exerce au regard des garanties proposées, de la situation financière du débiteur, et de sa capacité à tenir ses engagements. Nulle part la « bonne foi » n’est écrite dans le texte ; mais elle irrigue tout le processus. Elle se devine dans la transparence du cotisant, la régularité de ses déclarations, la sincérité de ses démarches.
Les remises et majorations : la bonne foi, condition implicite mais essentielle
L’article R243-20 ajoute une nuance importante : la remise des pénalités et majorations n’est envisageable qu’après règlement de la totalité des cotisations et contributions ayant donné lieu à application des majorations ou lorsque le cotisant a souscrit un plan d’apurement avec l’organisme de recouvrement dont il relève. Là encore, la bonne foi n’est pas proclamée, mais attendue. Celui qui promet de payer, puis paie, démontre davantage que sa solvabilité : il prouve sa loyauté.
De même, l’article R243-11 institue un mécanisme bienveillant : lorsque le cotisant, respectant ses obligations déclaratives, n’a pas versé les cotisations et contributions sociales à la date d’exigibilité mais s’en acquitte dans un délai de trente jours, ou souscrit dans ce même délai un plan d’apurement et en respecte les termes, il échappe aux majorations de retard et pénalités prévues à l’article R. 243-16, sous réserve de deux conditions cumulatives : aucun retard de paiement n’a été constaté au cours des vingt-quatre mois précédents et le montant des majorations et pénalités qui seraient applicables est inférieur à la valeur mensuelle du plafond de la sécurité sociale. Le droit récompense ainsi la réactivité et la volonté de réparer, autrement dit, la bonne foi en acte, tout en encadrant ce bénéfice par des critères objectifs de régularité et de proportionnalité.
La vision du juge sur la bonne foi du cotisant
Les juridictions sociales rappellent régulièrement que ce n’est pas au juge d’accorder des délais, mais bien au directeur de l’URSSAF.
Dans son arrêt du 19 novembre 2024 (CA Orléans, ch. sécurité sociale, 19 nov. 2024, n° 23/02703), la cour rappelle que, même lorsque le cotisant expose ses difficultés et fait preuve de bonne foi, ces éléments ne sauraient être pris en compte par le juge pour accorder des délais de paiement. En effet, seule l’URSSAF dispose de la compétence pour apprécier la situation du cotisant et accorder, le cas échéant, des délais adaptés à sa situation.
La bonne foi du cotisant, si elle ne peut influer sur la décision du juge, doit donc être portée à la connaissance de l’organisme de recouvrement, seul habilité à apprécier l’opportunité d’un aménagement des modalités de paiement.
De la même manière, la question de la remise des majorations de retard est strictement encadrée. La cour d’appel d’Orléans, dans un arrêt du 25 juin 2024 (CA Orléans, ch. sécurité sociale, 25 juin 2024, n° 23/00935), a jugé que la bonne foi constitue une condition nécessaire, mais non suffisante, la remise n’étant envisageable que si le cotisant a effectivement acquitté les cotisations dues.
Ainsi, un employeur qui répond aux sollicitations de l’organisme, justifie de ses difficultés et propose un plan de règlement cohérent, voit généralement son dossier examiné avec davantage de bienveillance, sous réserve du respect des conditions légales.
URSSAF et contentieux : le faisceau d’indices de la loyauté du cotisant
La bonne foi du cotisant, en matière de contentieux URSSAF, se déduit d’un ensemble d’indices objectifs, désormais bien identifiés par la jurisprudence.
L’analyse croisée des textes et de la jurisprudence permet de dégager les principaux éléments du faisceau d’indices caractérisant la bonne foi du cotisant dans le contentieux URSSAF.
En premier lieu, la transparence et la régularité des déclarations constituent un indice fort de bonne foi. Un cotisant qui procède à des déclarations complètes, même entachées d’erreurs, et qui répond aux demandes d’information de l’URSSAF, manifeste sa volonté de respecter ses obligations. L’absence de dissimulation ou de fausse déclaration est un critère déterminant, comme l’a rappelé la Cour d’appel de Paris (Pôle 6 – chambre 12, 5 février 2021, n° 17/05689), qui a admis la suppression des pénalités en présence d’erreurs imputables à la caisse et d’une attitude loyale du cotisant.
En second lieu, la diligence apportée à la correction d’erreurs ou à la régularisation de la situation est également un indice favorable. Un cotisant qui, informé d’une erreur, procède sans délai à la régularisation, démontre son absence d’intention frauduleuse. La jurisprudence a ainsi souligné que la coopération du cotisant avec l’administration, notamment lors de contrôles, milite en faveur de la reconnaissance de sa bonne foi.
L’absence d’antécédents de fraude ou de dissimulation, ainsi que la conformité aux instructions administratives, sont également pris en compte. L’article L243-6-2 du Code de la sécurité sociale protège ainsi le cotisant qui s’est fié à une circulaire ou à une instruction, même si celle-ci est ultérieurement remise en cause.
Par ailleurs, la jurisprudence exclut la qualification de mauvaise foi en cas de simple négligence, d’imprudence ou d’erreur d’interprétation des textes, sauf à démontrer une volonté délibérée de fraude.
La charge de la preuve de la mauvaise foi incombe à l’administration, conformément à l’article 2274 du Code civil et à l’article L123-2 du Code des relations entre le public et l’administration. La jurisprudence exige à cet égard des éléments précis et concordants pour écarter la bonne foi du cotisant.
Bonne foi et URSSAF : un levier de confiance et de dialogue durable
La bonne foi n’est pas une simple formalité administrative : elle s’érige en véritable clé de voûte d’une relation apaisée et constructive avec l’URSSAF. Elle irrigue l’ensemble des échanges entre le cotisant et l’organisme de recouvrement, conférant à la démarche déclarative une dimension éthique qui dépasse la stricte exécution d’obligations légales.
Celui qui reconnaît sa dette, l’explique, la documente et la traite avec sérieux, s’inscrit dans une logique de transparence et de responsabilité. Ce comportement, loin d’être anodin, constitue un véritable capital de crédibilité : il n’est pas toujours inscrit dans les textes, mais il est perçu et apprécié par l’administration. La bonne foi se manifeste ainsi dans la promptitude à répondre aux sollicitations, la clarté des explications fournies et la volonté manifeste de régulariser la situation, autant d’indices qui témoignent d’un esprit de coopération et d’un respect sincère de l’ordre social.
Si le droit du recouvrement social se montre rigoureux, il n’en demeure pas moins animé par une idée fondamentale : le cotisant loyal, transparent et réactif ne saurait être assimilé à un débiteur négligent ou de mauvaise foi. La jurisprudence rappelle régulièrement que la bonne foi, lorsqu’elle est établie, peut justifier une appréciation plus conciliante de la part de l’URSSAF, notamment en matière de remise de majorations ou de pénalités. Ainsi, la relation entre l’administration et le cotisant s’inscrit dans une dynamique de confiance réciproque, où la loyauté et la diligence sont, en définitive, les meilleurs garants d’un dialogue apaisé et d’une résolution équitable des difficultés.
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