
L’un de vos salariés estime que sa pathologie est liée à son activité professionnelle et engage une démarche de reconnaissance en maladie professionnelle. Quelles sont vos obligations en tant qu’employeur ? Quels sont les risques si vous n’agissez pas correctement ? Cet article fait le point sur les impacts juridiques, financiers et organisationnels pour l’employeur en cas de maladie professionnelle.
Quelles obligations pour l’employeur ?
Déclaration de maladie professionnelle : rôle de l’employeur
Contrairement à l’accident du travail, c’est au salarié qu’il revient de déclarer une maladie professionnelle auprès de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). Il doit transmettre à la Caisse un formulaire dédié, accompagné d’un certificat médical initial précisant le lien avec le travail.
Une fois informé de cette déclaration, l’employeur doit :
- Transmettre une attestation de salaire à la CPAM, pour permettre le calcul des indemnités journalières ;
- Renseigner les arrêts de travail, le cas échéant, via la Déclaration Sociale Nominative (DSN) ;
- Compléter le questionnaire de la CPAM sur les conditions de travail dans un délai de 30 jours ;
- Se tenir disponible pour toute enquête ou observation de poste diligentée par la Caisse.
Maladie professionnelle : causes et mise à jour du DUER
Il est essentiel que l’employeur identifie les causes de la maladie professionnelle afin de mettre en œuvre des mesures de prévention adaptées et éviter la survenance de cas similaires.
La survenance d’une maladie professionnelle avérée doit être prise en compte dans la mise à jour du Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUER).
Même si cette actualisation n’est pas imposée automatiquement par les textes, elle est très largement conseillée. En effet, en cas de nouvelle pathologie similaire, l’employeur pourrait se voir reprocher l’absence de mesures correctives, alors même qu’il avait connaissance du risque, ce qui engagerait sa responsabilité.
Licenciement du salarié en maladie professionnelle
Le salarié en arrêt pour maladie professionnelle bénéficie d’un statut protecteur. Un licenciement prononcé pendant cette période fait courir un risque élevé de nullité, l’un des plus importants en droit du travail en cas de contentieux.
Un licenciement n’est envisageable que pour une faute grave ou un motif étranger à l’état de santé du salarié. Ces situations doivent être traitées avec une extrême prudence, tant les enjeux juridiques sont lourds et les conditions de validité strictes.
Maladie professionnelle : quels impacts financiers ?
Complément de salaire au profit du salarié
Le salarié en arrêt pour maladie professionnelle peut bénéficier, sous certaines conditions, d’un complément de salaire versé par l’employeur, en plus des indemnités journalières de la Sécurité sociale (IJSS).
Ce complément varie selon :
- Le Code du travail (ancienneté, délais de déclaration…) ;
- La convention collective applicable ;
- Éventuellement, un contrat de prévoyance souscrit par l’entreprise.
À noter que les IJSS versées dans le cadre d’une maladie professionnelle sont plus favorables que celles d’un arrêt maladie classique :
- Pas de délai de carence ;
- Taux de calcul majoré.
Cotisation AT/MP : comment la CPAM récupère les coûts
Les frais de santé et les indemnités journalières liés à la maladie professionnelle sont pris en charge par la CPAM, mais cette dernière les récupère via les cotisations AT/MP (Accidents du Travail / Maladies Professionnelles) payées par l’employeur.
Pour mutualiser le risque entre les entreprises selon leur taille, le taux de cotisation varie selon le régime applicable :
- Taux collectif pour les entreprises de moins de 20 salariés (basé sur la sinistralité de la branche) ;
- Taux mixte pour les entreprises de 20 à 149 salariés ;
- Taux individualisé à partir de 150 salariés, fondé sur la sinistralité propre à l’établissement.
Faute inexcusable : un risque lourd pour l’employeur
La faute inexcusable peut être reconnue lorsque l’employeur :
- Avait connaissance du risque auquel le salarié était exposé ;
- Et n’a pas pris les mesures nécessaires pour prévenir sa survenance.
Cette faute entraîne de lourdes conséquences civiles :
- Majoration de la rente AT/MP versée au salarié ;
- Indemnisation complémentaire (préjudices moraux, physiques, esthétiques, etc.).
Ces sommes sont avancées par la CPAM, mais entièrement récupérées auprès de l’employeur, sans mutualisation. Le risque financier est donc considérable, même pour une petite structure.
Ce risque peut être couvert par un contrat d’assurance spécifique : il est recommandé de vérifier si la police de l’entreprise inclut cette garantie.
En cas de contentieux pour faute inexcusable, il est essentiel de se rapprocher d’un avocat, afin d’évaluer l’exposition de l’entreprise et préparer une stratégie de défense adaptée.
Maladie professionnelle : le risque pénal pour l’employeur et le dirigeant
Un manquement grave à l’obligation de sécurité peut aussi exposer l’employeur à des poursuites pénales, sur le fondement de délits comme la mise en danger délibérée d’autrui, les blessures involontaires, voire l’homicide involontaire.
Ces poursuites peuvent viser l’entreprise en tant que personne morale, mais aussi le dirigeant à titre personnel, en sa qualité de représentant légal.
Une attention particulière doit être portée aux mesures alternatives aux poursuites, notamment la composition pénale, qui implique une reconnaissance de culpabilité. Celle-ci peut être opposable dans une procédure civile ultérieure, notamment en cas d’action en reconnaissance de faute inexcusable.
Maladie professionnelle : que faire après la reconnaissance ?
Visite de reprise après maladie professionnelle : une obligation automatique
En cas de reprise du travail après un arrêt pour maladie professionnelle, l’employeur doit organiser une visite de reprise auprès du Médecin du travail, dans les 8 jours, quelle que soit la durée de l’arrêt.
Cette spécificité du régime des maladies professionnelles vise à permettre au Médecin du travail :
- D’évaluer l’aptitude du salarié à reprendre son poste ;
- De proposer, si besoin, un aménagement ou un reclassement.
Rôle du CSE et suivi des risques professionnels
Lorsqu’une maladie professionnelle est reconnue, l’employeur doit s’assurer que les indicateurs de santé au travail(nombre, gravité, fréquence) sont bien renseignés dans la BDESE (base de données économiques, sociales et environnementales), accessible au Comité Social et Économique (CSE), conformément à l’article R. 2312-9 du Code du travail.
Le CSE peut alors exercer ses missions de vigilance sur les risques professionnels et proposer des mesures de prévention adaptées.
Licenciement pour inaptitude après maladie professionnelle
La procédure de licenciement pour inaptitude est encadrée par le Code du travail et repose sur un avis d’inaptitude émis par le Médecin du travail.
À compter de cet avis, l’employeur dispose d’un délai d’un mois pour :
- Soit proposer un reclassement au salarié ;
- Soit, en l’absence de solution, prononcer le licenciement.
À défaut, il devra reprendre le paiement des salaires.
Cette procédure comprend plusieurs étapes :
- Consultation obligatoire du CSE sur les possibilités de reclassement ;
- Information du salarié, sauf dispense du Médecin du travail ;
- Motivation du licenciement précisant l’impossibilité de reclassement ou le refus du salarié.
Lorsque l’inaptitude est consécutive à une maladie professionnelle, le salarié bénéficie :
- D’une indemnité spéciale de licenciement, équivalente au double de l’indemnité légale ou conventionnelle ;
- D’une indemnité compensatrice de préavis, même s’il ne peut pas l’exécuter.
La reconnaissance d’une maladie professionnelle entraîne des obligations précises pour l’employeur, tant sur le plan déclaratif que dans la gestion du contrat de travail et l’analyse des risques. Elle peut également avoir des répercussions financières et juridiques importantes, notamment en cas de faute inexcusable.
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