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Discipline au collège, au lycée et à l’université

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Élèves, étudiants et pouvoir disciplinaire des établissements

En milieu éducatif (écoles, collèges, lycées, universités), le droit disciplinaire des usagers désigne l’ensemble des règles encadrant les sanctions pouvant être infligées aux élèves et étudiants. Les usagers de l’éducation (élèves mineurs ou étudiants majeurs) sont soumis à des règlements intérieurs et à des procédures disciplinaires internes en cas de manquements.

Pourquoi un régime disciplinaire pour les élèves et étudiants ? Parce que le bon ordre et la sécurité au sein des établissements scolaires et universitaires l’exigent, tout en devant respecter les droits et garanties de ces usagers, qui ne sont pas des agents publics mais bénéficient malgré tout de protections juridiques (droits de la défense, proportionnalité des sanctions, etc.).

L’enjeu est de taille : une exclusion temporaire ou définitive peut compromettre la scolarité d’un élève ou le cursus d’un étudiant. Il importe donc que la procédure disciplinaire soit équitable et conforme au droit. Au fil du temps, la jurisprudence administrative a affirmé que les décisions disciplinaires à l’encontre des élèves ou étudiants sont des actes administratifs faisant grief, susceptibles de recours devant le juge administratif. Autrement dit, finie l’époque où ces sanctions étaient considérées comme de simples mesures d’ordre intérieur insusceptibles de contrôle : désormais, le contentieux disciplinaire des usagers de l’enseignement est bien réel, et plusieurs arrêts en ont précisé les règles.

Dans cette introduction, retenons que les principes directeurs du droit disciplinaire (respect des droits de la défense, proportionnalité, motivation des décisions) s’appliquent aussi aux usagers.

Le législateur et le pouvoir réglementaire (via le Code de l’éducation) ont posé un cadre, mais c’est la jurisprudence qui l’a affiné. Le Conseil d’État a, par exemple, confirmé le droit d’un élève à être assisté par un avocat devant le conseil de discipline de son lycée, ou encore, plus récemment, le droit au silence d’un étudiant poursuivi disciplinairement à l’université, par analogie avec les fonctionnaires. Parcourons les particularités du régime disciplinaire scolaire et universitaire, ainsi que les évolutions récentes destinées à mieux protéger les droits des élèves et étudiants.

Le régime disciplinaire dans les établissements scolaires (collèges et lycées publics)

Dans les collèges et lycées publics, le pouvoir disciplinaire est encadré par le Code de l’éducation (articles R.511-12 et suivants) ainsi que par les règlements intérieurs de chaque établissement.

Qui exerce ce pouvoir ? Le chef d’établissement peut prononcer certaines punitions ou sanctions de faible gravité (avertissement, retenue, exclusion de quelques jours), mais les sanctions les plus lourdes (exclusion temporaire longue ou définitive) relèvent du Conseil de discipline de l’établissement. Ce conseil de discipline est une instance collégiale où siègent des représentants du personnel éducatif, des parents, et des élèves.

Les droits de l’élève durant la procédure disciplinaire scolaire ont été renforcés au fil du temps. Désormais, l’élève (et ses parents s’il est mineur) doit être convoqué au moins 5 jours avant la séance du conseil de discipline, avec indication précise des faits reprochés. L’élève a le droit de présenter sa défense, oralement ou par écrit, et d’être assisté par la personne de son choix, y compris un avocat. Ce point est capital : la présence d’un défenseur (avocat ou autre) est explicitement prévue et a été confirmée par la jurisprudence (TA et CAA) comme une garantie essentielle. En outre, l’élève et ses parents doivent pouvoir consulter l’intégralité du dossier monté contre lui (témoignages, rapports) avant la réunion du conseil. Le conseil de discipline doit se dérouler dans le respect du contradictoire : l’élève et son représentant peuvent prendre la parole, poser des questions, et le conseil doit délibérer de manière impartiale. La décision (sanction ou relaxe) doit ensuite être notifiée par écrit et motivée.

Un apport notable de la jurisprudence concerne la possibilité de contester ces décisions. Les sanctions disciplinaires des élèves du secondaire sont des décisions administratives faisant grief – donc susceptibles de recours. Par exemple, un élève exclu définitivement d’un lycée peut exercer un recours gracieux auprès du recteur d’académie, et/ou un recours contentieux devant le tribunal administratif. Le juge administratif vérifiera notamment que la procédure a respecté les droits de l’élève et que la sanction est proportionnée à la faute. Il a été jugé, par exemple, qu’une exclusion définitive pour une simple incivilité mineure serait disproportionnée et donc illégale. À l’inverse, le juge admet des sanctions sévères pour des faits graves (violences, trafic de stupéfiants dans l’établissement) à condition que la procédure disciplinaire soit régulière.

On notera par ailleurs qu’un décret du 24 juin 2011 (NOR : MENE1016345D) a refondu la discipline au sein des établissements secondaires, et a été validé par le Conseil d’État malgré des recours. Ce décret a introduit notamment la possibilité de sanctions assorties de sursis et a précisé le régime des travaux d’intérêt général scolaires. Le Conseil d’État a rejeté les critiques contre ce texte, confirmant ainsi la légalité du nouveau barème de sanctions (Conseil d’État, Assemblée, 6 juin 2014, 351582, Publié au recueil Lebon).

En résumé, dans le secondaire, le droit disciplinaire des élèves vise un équilibre entre fermeté éducative et respect des droits de l’enfant/élève. La présence d’un avocat, la communication du dossier, la motivation de la décision et la possibilité de recours sont autant de points de vigilance pour les chefs d’établissement s’ils veulent éviter l’annulation de leurs décisions par le juge.

Le régime disciplinaire à l’université et dans l’enseignement supérieur

En ce qui concerne les étudiants de l’enseignement supérieur (universités, instituts, grandes écoles publiques), le régime disciplinaire diffère par certains aspects, tout en partageant les mêmes exigences de fond. Les étudiants majeurs relèvent de sections disciplinaires propres à chaque université. Ces sections disciplinaires sont généralement composées d’enseignants et d’étudiants élus, et fonctionnent comme des juridictions disciplinaires internes. Elles connaissent des infractions telles que la fraude aux examens, le plagiat, les troubles à l’ordre au sein de l’université, etc.

La procédure est prévue par le Code de l’éducation (articles R.811-10 et suivants pour les universités). Lorsqu’un étudiant est poursuivi, il est cité à comparaître devant la section disciplinaire et informé des faits reprochés. Là aussi, les droits de la défense s’appliquent pleinement : l’étudiant peut préparer un mémoire en défense, se faire assister d’un avocat ou d’un représentant de son choix, citer des témoins. Si les faits le justifient, il peut être suspendu à titre conservatoire en attendant la décision (par exemple en cas de trouble grave), mais cette mesure provisoire ne préjuge pas de la sanction finale.

La jurisprudence récente apporte des éclairages significatifs. Par exemple, le Conseil d’État a censuré une décision disciplinaire d’université qui ne mentionnait pas les noms des membres du jury disciplinaire : cette omission constituait un vice de forme substantiel, car la décision avait « le caractère d’une décision juridictionnelle » exigeant la publicité de la composition (Conseil d’État, 4ème chambre, 25 octobre 2021, 449286, Inédit au recueil Lebon).

De plus, transposant la récente évolution sur le droit au silence, le juge administratif a considéré que les étudiants poursuivis disciplinairement doivent eux aussi être informés de leur droit de se taire. Dans un arrêt du 9 mai 2025, le Conseil d’État a jugé que « l’usager d’une université faisant l’objet de poursuites disciplinaires ne peut être entendu sur les agissements reprochés que s’il a été préalablement informé du droit qu’il a de se taire ». Autrement dit, un étudiant mis en cause ne saurait être interrogé sans avoir été averti qu’il peut ne pas répondre aux questions incriminantes. Cette décision (CE, 9 mai 2025, n°499277, Publié au recueil Lebon) aligne la discipline universitaire sur la garantie constitutionnelle dégagée pour les fonctionnaires, preuve de la porosité des principes protecteurs entre ces deux univers.

Quant au contrôle du juge sur le fond, il est aussi rigoureux qu’en matière de fonctionnaires. De même, le Conseil d’État a eu à connaître d’affaires de fraudes aux examens : il a validé la légalité de l’exclusion d’un étudiant tricheur en veillant à ce que la procédure (notamment l’enquête et l’audition de l’intéressé) ait été régulière et que la sanction (par exemple un an d’exclusion) ne soit pas disproportionnée par rapport à la gravité de la fraude.

Exemples jurisprudentiels et situations particulières

Pour illustrer concrètement le droit disciplinaire des usagers, évoquons quelques situations et leur traitement juridique :

  • Violences ou incivilités graves au lycée : un élève de lycée qui commet des violences physiques envers un camarade ou un membre du personnel s’expose à une exclusion définitive prononcée par le conseil de discipline. Jurisprudence et circulaires rappellent qu’en pareil cas, le conseil de discipline doit apprécier la gravité et éventuellement tenir compte du comportement antérieur de l’élève. Si l’élève présente des circonstances atténuantes (provocation, repentir), une exclusion temporaire d’un mois ou deux trimestres peut être préférée à l’exclusion définitive. Le juge administratif, s’il est saisi, vérifiera l’absence d’erreur manifeste dans cette appréciation et de proportionnalité.
  • Fraude à un examen universitaire : en cas de triche (antisèche, plagiat de mémoire, usurpation d’identité), la section disciplinaire universitaire peut décider l’exclusion de l’étudiant pour une durée pouvant aller jusqu’à 5 ans, voire l’exclusion définitive de tout établissement public d’enseignement supérieur dans les cas les plus graves. Ces sanctions lourdes sont rares et réservées aux fraudes caractérisées. Le Conseil d’État a eu l’occasion de juger qu’une exclusion de 5 ans pour un plagiat massif de mémoire de master n’était pas disproportionnée compte tenu de l’atteinte à l’intégrité scientifique du diplôme. En revanche, pour une copie d’examen partiellement copiée sur un voisin (fraude ponctuelle), une exclusion d’un an a pu être jugée suffisante.
  • Comportements relevant de la liberté d’expression ou de manifestation : la frontière entre faute disciplinaire et exercice d’une liberté est parfois subtile. Par exemple, un étudiant qui perturbe un conseil d’université par des slogans revendicatifs exerce sa liberté d’expression politique. S’il n’y a pas de violence ni de trouble grave, une sanction disciplinaire serait susceptible d’être annulée pour atteinte disproportionnée à une liberté fondamentale. Les juridictions administratives examinent avec soin ce type de dossiers pour éviter que le disciplinaire serve à museler des contestations légitimes. Ainsi, dans l’affaire des “étudiants bloqueurs” pendant les mouvements universitaires, les sanctions pour entrave aux cours ont été examinées au cas par cas : le juge a pu annuler des sanctions lorsque l’administration n’apportait pas la preuve individualisée du rôle perturbateur de tel ou tel étudiant.
  • Mesures conservatoires et droits des usagers : un chef d’établissement scolaire peut prononcer, en cas d’urgence, une mesure conservatoire d’éloignement d’un élève avant le conseil de discipline (exclusion provisoire) – circulaire n° 2011-111 du 1er août 2011 (BO n° 30 du 25 août 2011) sur le règlement intérieur et la discipline dans les établissements scolaires publics. La jurisprudence qualifie cela de mesure d’ordre intérieur si sa durée n’excède pas quelques jours, mais au-delà d’un certain délai (8 jours par exemple), cette exclusion provisoire peut être requalifiée en sanction déguisée, soumise alors au contrôle du juge. De même, en université, la suspension provisoire d’un étudiant dans l’attente de sa comparution doit être limitée dans le temps et motivée par des circonstances exceptionnelles (danger immédiat, trouble actuel à l’ordre).

Vers une convergence des garanties disciplinaires pour élèves, étudiants et agents publics

Le droit disciplinaire des usagers de l’enseignement, qu’ils soient élèves du secondaire ou étudiants du supérieur, a considérablement évolué pour offrir des garanties procédurales et substantielles robustes. On constate une convergence des principes avec le droit disciplinaire applicable aux fonctionnaires : droit à la défense (assistance d’un avocat), droit à un procès équitable, droit au silence récemment consacré pour les étudiants, exigence de motivation et de proportionnalité des sanctions. L’objectif est de concilier l’autorité éducative nécessaire au bon fonctionnement des établissements avec le respect des droits fondamentaux des usagers du service public de l’éducation.

Les décisions récentes du Conseil d’État renforcent cette convergence : elles rappellent que les usagers ne sauraient être traités arbitrairement ou de manière expéditive sous prétexte qu’ils ne sont pas des agents publics. Au contraire, la dimension éducative de la sanction (notamment pour les mineurs) implique encore plus de prudence et de pédagogie dans l’application du pouvoir disciplinaire.

Pour les chefs d’établissements scolaires et les présidents d’université, la leçon est claire : il est impératif de respecter scrupuleusement la procédure disciplinaire prévue par les textes et enrichie par la jurisprudence, sous peine de voir leurs décisions annulées par le juge administratif. Pour les élèves, étudiants et leurs familles, ces garanties offrent une protection réelle contre d’éventuels abus ou erreurs, et leur permettent de faire valoir leurs droits en cas de sanction injuste.

En définitive, le droit disciplinaire des usagers illustre la judiciarisation maîtrisée du monde éducatif : sans tomber dans l’excès (la plupart des conflits se règlent en interne), il prévoit un recours au juge en dernier ressort pour vérifier que les principes de légalité et de justice sont bien respectés au sein de l’École et de l’Université.

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