Les Émirats arabes unis ont modernisé leur droit de la concurrence par le Federal Decree Law n° 36 de 2023 (Competition Law), complété par des décisions d’application en 2024. En s’appuyant sur l’article source « UAE’s New Competition Law: Strategic Insights for Merger Control » (STA Law Firm, juillet 2025), ce guide expose les points clés du nouveau régime de contrôle des concentrations, ses seuils de notification, ses délais et les bonnes pratiques pour sécuriser une opération (M&A, JV, acquisitions d’actifs).
Portée et structure du nouveau régime
Le nouveau cadre remplace la loi de 2012 et aligne la pratique des EAU sur les standards internationaux. Il confirme la compétence du Ministry of Economy (MoE) et du Competition Regulation Committee (CRC) pour examiner les concentrations présentant un effet sur le marché émirien, y compris pour certains deals « foreigntoforeign » dès lors qu’il existe un lien de marché (chiffre d’affaires local, base clients aux EAU, etc.). Les opérations visées couvrent les fusions, prises de contrôle, JV « fullfunction » ou transferts d’actifs entraînant un changement de contrôle (y compris de facto via des droits de veto significatifs).
Seuils et déclenchement de la notification
Le dispositif introduit un test hybride combinant chiffre d’affaires et parts de marché au sein du marché pertinent. En pratique :
- Une notification préalable est requise si les parties dépassent un seuil de chiffre d’affaires agrégé aux EAU (selon la décision d’application en vigueur) ;
- Ou si l’opération confère à l’acquéreur une part de marché significative dans le marché pertinent, au delà du seuil réglementaire.
Ce mécanisme élargit le périmètre des transactions notifiables, notamment dans les marchés concentrés où des acquisitions d’ampleur modeste peuvent générer une domination.
Contrôle et calendrier
Le processus suit une logique en deux phases :
- Phase I : examen initial (délai court) et clearance lorsque les chevauchements sont limités ou traitables.
- Phase II : enquête approfondie si un renforcement de position dominante ou une atteinte substantielle à la concurrence est à craindre. Des remèdes peuvent être exigés (cessions, engagements de non discrimination, accès, etc.).
Le MoE statue dans des délais encadrés, prolongeables pour les dossiers complexes. Le gunjumping (mise en œuvre anticipée, échanges d’informations sensibles sans gardefous) est sanctionné (amendes significatives, nullité potentielle de l’opération).
Marché pertinent et analyse concurrentielle
L’instruction s’appuie sur une définition rigoureuse du marché pertinent (produit/service et géographie) ; l’autorité évalue la structure concurrentielle (indice HHI), les barrières à l’entrée, la pression des acheteurs, et les effets sur l’innovation et le bien être du consommateur. Les parties peuvent faire valoir des efficiences (réduction de coûts, qualité, R&D) démontrables et spécifiques, pour contrebalancer les risques concurrentiels.
Interactions sectorielles et approbations parallèles
Des secteurs requièrent des feux verts additionnels (banque/assurance, télécoms, santé, données personnelles/PDPL). Les opérations touchant des régulateurs sectoriels (CBUAE, TDRA, autorités santé, etc.) doivent articuler notification concurrence et autorisations sectorielles. Les véhicules DIFC/ADGM n’excluent pas l’examen si l’opération a un lien de marché avec le mainland.
Bonnes pratiques pour « sécuriser » la concentration
- Dès le term sheet : tester l’éligibilité à notification (seuils, parts), cartographier chevauchements et marchés dynamiques (fintech, cloud, data).
- Prénotification : solliciter un dialogue informel avec le MoE (périmètre, pièces, marché pertinent).
- Gardefous d’intégration : clean teams, holdseparate, clauses d’interdiction d’influence avant clearance.
- Économistes : mobiliser un soutien quantitatif (HHI, scénarios, analyses de pouvoir d’achat).
- Remèdes : préparer, si besoin, des divestitures ciblées ou engagements comportementaux proportionnés.
Risques et contentieux
Le nonrespect des obligations de notification ou de gel (gunjumping) expose à des amendes substantielles et à des risques de nullité. Les décisions du CRC sont contestables (reconsidération administrative, puis recours juridictionnel). La cooperation internationale avec d’autres autorités de concurrence se renforce ; anticiper la cohérence des remèdes multipays.
Feuille de route opérationnelle
- Évaluer l’ancrage EAU (clients, revenus, part de marché) et les seuils applicables.
- Qualifier le contrôle (juridique vs de facto) et la JV (fullfunction ?).
- Structurer le dossier : marché pertinent, analyses économiques, efficiences.
- Planifier le calendrier (Phase I/II) et les approbations sectorielles.
- Déployer les protocoles d’intégration préclearance (clean teams, accès limité).
Le nouveau droit de la concurrence des EAU fait du merger control un chantier stratégique à part entière. En posant tôt l’analyse des seuils, des marchés pertinents et des gardefous (information et intégration), les parties sécurisent le calendrier et maximisent la certitude de réalisation des opérations.
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