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Revirement de jurisprudence en droit du travail : la preuve illicite ou déloyale n’est plus nécessairement irrecevable

Dans un procès prud’homal, la preuve d’un fait ou d’une situation, peut être apportée par tout moyen (SMS, courriers électroniques, captures d’écran, photographies…). C’est le principe de la liberté de la preuve encore rappelé récemment par la Cour de cassation (Cass. Soc. 19 avril 2023 n°21-20.308).

Cependant, il existe certaines limites liées notamment à la licéité et à la loyauté de la preuve, selon lesquelles un élément de preuve ne pouvait être pris en compte par le juge que s’il ne portait pas atteinte à d’autres droits et s’il avait été obtenu de manière loyale, c’est à dire en dehors de toute manœuvre, tromperie ou clandestinité.

C’est ce que considérait de manière constante la Cour de cassation et en particulier dans un arrêt d’assemblée pleinière selon lequel la preuve recueillie à l’insu de la personne ou obtenue par une manœuvre ou un stratagème était irrecevable (Ass. Plén., 7 janvier 2011, n°09-14.316 et n°09-14.667).

Dès lors, le juge prud’homal devait systématiquement écarter des débats la preuve obtenue par de tels moyens.

C’est dans le prolongement de cette jurisprudence que la Cour d’appel d’Orléans a déclaré irrecevable des enregistrements sonores réalisés à l’insu d’un salarié. Dans cette affaire, un salarié contestait son licenciement pour faute grave et l’employeur produisait comme seule preuve de cette faute, des enregistrements clandestins d’entretiens au cours duquel le salarié tenait des propos ayant motivé son licenciement (CA Orléans, 28 juillet 2020, n°18/00226).

Cette décision de la Cour d’appel d’Orléans est toutefois cassée par l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation au visa de l’article 6 § 1 de la Convention EDH et de l’article 9 du Code de procédure civile.

Par arrêt du 22 décembre 2023, la Haute juridiction a effectué un important revirement de jurisprudence en considérant que le principe de loyauté de la preuve pouvait conduire à priver une partie du moyen d’établir la preuve de ses droits.

Ce revirement s’inscrit dans la lignée de la CEDH qui n’a jamais établi de distinction entre preuve illicite et preuve déloyale et qui n’écarte pas nécessairement les éléments de preuves déloyales.

En effet, les juges européens considèrent que si le droit à la preuve garanti par l’article 6 § 1 de la Convention EDH entre en conflit avec d’autres droits et libertés (le droit au respect de la vie privée, le droit à la défense etc.) il appartient aux juges de les mettre en balance.

Sur ce fondement, la Cour de cassation admet désormais que « dans un procès civil, l’illicéité ou la déloyauté dans l’obtention ou la production d’un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l’écarter des débats » (Ass. Plén., 22 décembre 2023, n°20-20.648).

Par conséquent, des moyens de preuve déloyaux peuvent désormais être présentés au juge prud’homal.

Toutefois, la recevabilité d’une preuve obtenue de manière déloyale pour faire valoir ses droits est soumise à une double condition :

  • elle devra être indispensable à l’exercice du droit à la preuve,
  • l’atteinte aux droits fondamentaux en présence (vie privée, procès équitable, etc.) devra être strictement proportionnée au but poursuivi.

Il incombera dès lors aux juges de s’assurer du caractère indispensable de cet élément de preuve et de procéder à un contrôle de proportionnalité avant de déclarer recevable ou irrecevable la preuve obtenue de manière déloyale.

La nouvelle position de la Cour de cassation élargit sans nul doute les modes de preuve et risque de faire évoluer les pratiques en cas de litige prud’homal.

Les parties vont-elles prendre l’habitude d’enregistrer leurs entretiens pour se constituer des éléments de preuve et anticiper un litige futur ?

Les images de vidéosurveillance non-déclarées seront-elles produites par l’employeur pour prouver des fautes commises par leurs salariés dans l’exécution de leur contrat de travail ?

Les situations de harcèlement ou de discrimination seront-elles plus facilement démontrées par le salarié devant le conseil de prud’hommes ?

Face à ces questions et des nombreux enjeux pratiques en découlant, nos avocats se tiennent à votre disposition pour répondre à toutes vos questions et vous conseiller. Nos entretiens peuvent se tenir en présentiel ou en visio-conférence. Vous pouvez prendre rendez-vous directement en ligne sur www.agn-avocats.fr.

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